Organisme(s) subventionnaire(s)
Conseil de recherche en sciences humaines (CRSH)
Années
En cours (2012-2016)
Chercheur(s) CHRS
Autre(s) chercheur(s)
Steven High
Ce projet d’histoire orale représente la deuxième et dernière phase d’une recherche sur l’internat de rééducation pour jeunes délinquants de Boscoville (1942-1997). Il vise à recueillir et à analyser la mémoire des pensionnaires et des éducateurs ayant vécu une expérience rééducative et institutionnelle qui a jalonné l’histoire de la protection des mineurs. Fondé modestement au début des années 1940, Boscoville se transforme au milieu de la décennie suivante en un espace thérapeutique moderne, appelé à devenir l’institution-phare du réseau québécois de prise en charge de la délinquance juvénile. Le centre s’impose comme le berceau d’une nouvelle discipline universitaire et d’une nouvelle pratique professionnelle – la psychoéducation – et jouit d’une réputation internationale. En son sein, les sciences de la psyché et de la pédagogie moderne sont mobilisées au profit du travail rééducatif. Sur le plan historique, cette approche thérapeutique axée sur le «vécu relationnel» consacre une rupture avec l’entreprise de disciplinarisation des mineurs initiée au milieu du 19e siècle au sein des écoles de réforme.
Le cœur de cette enquête consiste dans la réalisation d’entrevues avec des anciens délinquants hébergés à Boscoville ainsi qu’avec des anciens psychoéducateurs. Ces témoignages devraient permettre de pallier les lacunes du corpus documentaire constitué dans la première phase de la recherche. En effet, malgré la richesse des archives institutionnelles, celles-ci ne révèlent que de façon limitée la voix des acteurs directement concernés par l’expérience rééducative. En explorant la vie en internat par le biais de témoignages rétrospectifs, nous tenterons d’évaluer les effets à long terme de ces innovations thérapeutiques en les confrontant avec les promesses du discours institutionnel officiel. Nous prendrons ainsi mieux la mesure d’un virage thérapeutique qui impliquait une limitation des contraintes disciplinaires et une prise en compte inédite des besoins psycho-affectifs.
Ce projet contribuera à enrichir l’historiographie de la protection de la jeunesse. Au Québec, la recherche a bien mis en lumière les efforts pionniers de prise en charge de l’enfance « délinquante et en danger » en documentant l’histoire des écoles de réforme fondées au 19e et au début du 20e siècles et celle de la Cour des jeunes délinquants. Les dispositifs de traitement de la délinquance dans l’après-guerre demeurent cependant moins connus. Pourtant, sous le coup du développement des sciences psychologiques, de nouveaux modes d’intervention émergent dans un contexte de professionnalisation accélérée de l’intervention et d’affirmation des droits de la jeunesse. À ce jour, cette transition n’a fait l’objet que de quelques études et l’institution de Boscoville, emblématique de ces changements, n’a pas reçu toute l’attention méritée, malgré l’opuscule de Rumilly publié en 1978.
Le site Internet du projet est disponible ici.