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Hospice de la maternité catholique de Montréal

Maison-mère des Soeurs de la Miséricorde, Le Diocèse de Montréal à la fin du dix-neuvième siècle, Gaspard Dauth et al., 1900, BAnQ.

Autres appellations : Hôpital de la Miséricorde

But : Hôpital, soins de maternité

Congrégation ou association : Sœurs de la Miséricorde

Année de fondation : 1845

Description :

Au milieu du XIXe siècle, la société québécoise est consternée face au destin, bien souvent tragique, des nourrissons nés hors des liens du mariage. Les mères célibataires, que l’on appelle « filles-mères », sont frappées par l'opprobre social et peinent à trouver un refuge où accoucher de manière sécuritaire. Elles sont donc nombreuses à abandonner leur nouveau-né dans divers lieux de la métropole. C’est pour faire face à ce phénomène qu’en 1845, Rosalie Cadron-Jetté, une veuve montréalaise, fonde l’œuvre de la Miséricorde. D’abord logée dans le grenier d’une résidence, l’œuvre offre un lieu, à l’abri des regards, où les femmes peuvent mener leur grossesse à terme. Durant les six premières années d’activité de l’institution, ce sont 436 « filles-mères » qui y accouchent.

En 1851, grâce à un don du philanthrope Oliver Berthelet, la congrégation religieuse nouvellement formée des Sœurs de Miséricorde fait l’acquisition d’un terrain bordé par les rues La Gauchetière, Berri, St-Hubert et Dorchester. Plus spacieux et mieux équipé, l’institution accueille de plus en plus de femmes chaque année. Entre 1900 et 1921, environ 10 000 femmes y séjournent.

Ce qui devient au fil du temps un hôpital spécialisé en médecine obstétrique demeure d’abord et avant tout une institution de rédemption morale : on entend donner aux « pénitentes » l’occasion d’expier leur péché et de vivre de manière honorable selon les normes patriarcales de l’époque. Expier ce péché exige, aux yeux de l’Église et probablement de plusieurs femmes, de couper le lien maternel afin de pouvoir baptiser « l’enfant du crime », et éventuellement le placer en adoption.

La maternité accueille des femmes issues de toutes les classes sociales. Cependant celles déclarant un métier de domestique et d’ouvrière représentent 60% de la population admise annuellement. Majoritairement dans la jeune vingtaine, et pour la plupart d’origine canadienne-française, elles sont souvent incapables de payer pour leurs frais d’hébergement et de soins. Selon les règlements, elles doivent alors être hébergées dans les salles publiques en plus d’effectuer des travaux ménagers au sein de l’institution avant et après leur accouchement. D’autres se voient confier la déchirante tâche d’aider les sœurs aux soins des enfants. Leur horaire, très strict, oscille entre travail et enseignement religieux.

Leur séjour, d’une durée moyenne de 4 mois, se fait en étant coupé de tout contact extérieur. Afin de préserver l’honneur de la famille déjà menacé, l’anonymat est exigé. Des noms fictifs, tels qu’Humiliane, Extasie et Fructueuse, leur sont donnés, rappelant ainsi constamment aux pensionnaires qu’elles ont commis un péché grave.

S’occupant à la fois des mères célibataires et de leurs nourrissons, les sœurs de Miséricorde ont poursuivi leur œuvre jusqu’au début des années 1970. La libéralisation des normes sexuelles, l’acceptation sociale des mères célibataires ainsi que la prise en charge par l’État québécois de la protection de la jeunesse rendaient dès lors leur mission obsolète.

Crédit photo : Maison-mère des Soeurs de la Miséricorde, Le Diocèse de Montréal à la fin du dix-neuvième siècle, Gaspard Dauth et al., 1900, BAnQ.

Adresse en 1861 : 250 Dorchester Est

Adresse en 1881 : 345 Dorchester Est

Adresse en 1901 : 440 Dorchester Est