Conférence de Rafael Mandressi : «Le surnaturel et la gestion des corps : médecins et chirurgiens face au démoniaque dans la France du XVIIe siècle»

Le CHRS et le GRHS (Groupe de recherche en histoire des sociabilités) vous invitent à la conférence de Rafael Mandressi, chargé de recherche au CNRS et directeur-adjoint du Centre Alexandre Koyré d’histoire des sciences à Paris (EHESS), le mercredi 6 avril à l’UQAM. Pour cette conférence, Mandressi fera une analyse des expertises médicales sous l’Ancien régime, particulièrement sur les interventions des médecins dans les cas de possession démoniaque.

Quand : Indéterminé

Où : A-6290, UQAM

Le conférencier sera présent par visioconférence

Résumé la conférence

Le corps est un lieu double au regard des savoirs médicaux : source des connaissances et cible de leurs applications. Dans le premier cas, les enjeux sont ceux des manières d’obtenir les connaissances et de les disposer dans des systèmes d’intelligibilité. Quant au second, les interventions des médecins ne se limitent pas à la seule sphère du thérapeutique. Il s’agit aussi d’interroger les corps pour mettre les réponses obtenues au service d’autres usages : judiciaires, théologiques, philosophiques. Les cas de possession démoniaque le montrent bien : les médecins appelés à intervenir rendent des avis sur le caractère naturel ou non des phénomènes observés, leur témoignage sert à certifier si l’on est en présence de désordres de type pathologique ou bien d’événements dépassant la nature. Aussi retrouve-t-on dans ces affaires la problématique de la preuve, non pas en termes de validation des connaissances, mais dans un tout autre registre, imposé par le cadre judiciaire et religieux : il s’agit de fournir la preuve par le corps sur la présence ou l’absence du surnaturel dans des phénomènes de dérèglement apparent de l’ordre de la nature. Les médecins, les chirurgiens, amenés à agir et, surtout pour les premiers, à émettre une parole autorisée, nourrissent ainsi de leurs critères une gestion sociale et politique des corps qui, à défaut de soigner, conseille, tente d’expliquer et de rétablir un ordre, trace des frontières.

Quelques mots sur le conférencier

Rafael Mandressi (Montevideo, 1966) est historien, chargé de recherche de 1e classe au CNRS (Paris), et directeur-adjoint du Centre Alexandre-Koyré d’histoire des sciences et des techniques. Il fut responsable, entre 2010 et 2014, de la mention « Histoire des Sciences, Technologies, Sociétés » du Master en Sciences sociales de l’EHESS, où il enseigne.

Les travaux de Rafael Mandressi concernent notamment l’histoire de la médecine, des médecins et du corps dans l’Europe moderne. Les thèmes principaux de ses recherches dans ce domaine ont été l’histoire de l’anatomie (XVIe-XVIIIe siècle), l’histoire du cerveau et des fonctions cérébrales et l’histoire de l’historiographie de la médecine. Actuellement, ses deux principaux chantiers de recherche portent sur la médecine et l’économie des savoirs dans la première modernité européenne, et les relations entre médecine et politique dans la France d’Ancien régime.

Il a publié Le Regard de l’anatomiste : dissections et invention du corps en Occident (París, 2003 ; trad. esp. : Mexico, Universidad Iberoamericana, 2011), dirigé Figures de la preuve (Paris, Seuil, 2009) et codirigé, avec Wolf Feuerhahn, Les Sciences de l’homme à l’âge du neurone (Paris, Revue d’histoire des sciences humaines, n° 25, 2011). Il est par ailleurs l’auteur de plusieurs dizaines d’articles et de chapitres d’ouvrages collectifs, publiés aussi bien en français qu’en espagnol, anglais, italien ou allemand.

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